La volonté politique et position géopolitique, tels sont les grands mobiles qui motivent un pays à adhérer à plusieurs organisations à la fois, a rassuré mardi 27 octobre 2020 le Ministre des Affaires Etrangère et de la Coopération au Développement. L’Ambassadeur Albert SHINGIRO tranquillisait les Députés qui s’étonnaient du fait que le Burundi soit membre de plusieurs organisations malgré la fragilité de sa santé financière. L’Envoyé du Gouvernement a tenu ces propos en marge de l’analyse du Projet de Loi portant Ratification par la République du Burundi du Traité Révisé Instituant la Communauté Economique des Etats de l’Afrique Centrale (CEEAC) qui a été voté à l’unanimité des Députés présents à l’hémicycle de Kigobe. Pour le cas d’espèce, a-t-il illustré, le Burundi, frontalier à la fois à la RDC et à la Tanzanie, alors que ces deux pays sont membres de la SADEC, a déjà manifesté sa volonté d’adhérer à cette organisation.
- Vote des Députés
Le Traité instituant la Communauté Economique des Etats de l’Afrique Centrale (CEEAC), a-t-il annoncé dans son exposé des motifs, a été signé le 18 octobre 1983, à Libreville en République Gabonaise et est entré en vigueur au mois de décembre 1984. Ce dernier, a-t-il poursuivi, a été révisé et signé le 18 décembre 2020, à Libreville, au Gabon, et est entré en vigueur le 28 août 2020.
Outre la République d’Angola, la République du Burundi, la République du Cameroun, et la République Centrafricaine, cette Communauté, qui compte onze Etats membres, enregistre aussi en son sein la République du Congo, la République Gabonaise, la République de Guinée Equatoriale, la République Démocratique du Congo, auxquelles il faut ajouter la République du Rwanda, la République Démocratique de Sao Tomé et Principe et la République du Tchad.
L’objectif principal de la Communauté fixé à la création, a-t-il déclaré, était d’assurer « une intégration économique effective en vue d’améliorer le bien-être de la population d’Afrique Centrale ». Cet objectif, a-t-il regretté, n’ayant pas été atteint depuis des années suite à des raisons d’ordre politique, financier et humain, il a fallu penser à redynamiser la Communauté à travers une réforme institutionnelle.
Cette réforme institutionnelle engagée depuis 2015, a-t-il enchaîné, avait pour objectif d’ « améliorer l’efficacité et l’efficience de la CEEAC dans le but de réaliser un saut qualitatif majeur dans la gouvernance de l’Organisation pour en faire une Communauté Economique Régionale viable et forte, dotée d’un Exécutif à l’architecture rénovée et adaptée aux défis de l’heure ».
Et de détailler les innovations apportées au nouveau Traité révisé de la CEEAC par rapport à l’ancien :
- La transformation du Secrétariat Général de la CEEAC en Commission de la Communauté Economique des Etats de l’Afrique Centrale (CEEAC) dotée de compétences renforcées et comprenant sept Commissaires dont un Président, un Vice-Président et cinq Commissaires Chefs de Départements ;
- Création d’un Parlement Communautaire, d’une Cour des comptes et d’une Cour de Justice ;
- Insertion complète et définitive de l’architecture de paix et de sécurité de l’Afrique Centrale, y compris le Conseil de Paix et de Sécurité (COPAX), au sein du cadre institutionnel de la CEEAC et son arrimage à l’architecture de paix et de sécurité de l’Union Africaine ;
- L’institution d’un Comité des Représentants Permanents (COREP) composé des Ambassadeurs, Représentants Permanents ou autres plénipotentiaires des Etats membres, chargé d’étudier ou d’instruire pendant l’intersession sous la responsabilité du Conseil des Ministres, les questions et projets que lui soumet le Conseil des Ministres ou toute autre institution de la Communauté ;
- La modernisation des principes fondamentaux de la Communauté, et particulièrement l’introduction du principe de la géométrie variable en vue de permettre d’accélérer la mise en œuvre de l’agenda de l’intégration régionale avec les Etats membres qui sont prêts et laisser la possibilité à ceux qui ne le sont pas d’y adhérer plus tard.
A propos de ces innovations, la Commission des Affaires Politiques, Administratives, des Relations Extérieures et de la Communauté Est-Africaine, qui a été saisie au fond, a voulu savoir la relation qui existera entre le Parlement communautaire et les Parlements nationaux des pays membres.
Chaque Etat membre, a répondu l’Envoyé du Gouvernement, sera représenté par cinq membres élus au suffrage universel indirect par leurs Parlements nationaux pour un mandat de cinq ans renouvelable une fois. Ce fait que les Parlements nationaux élisent les membres pour le Parlement communautaire constitue déjà une grande relation entre ces deux institutions.
En outre, a-t-il ajouté, il sera mis en place un Protocole qui précisera les attributions, la composition, l’organisation et le fonctionnement du Parlement de la Communauté ainsi que les modalités de contrôle de l’action des Institutions communautaires. C’est à travers donc ce protocole que les relations entre les Etats membres et cette Institution seront définies.
Enfin, il a précisé que des lois, des décisions et des recommandations prises au niveau du Parlement communautaire doivent être référées aux Etats membres pour domestication et cela à travers les Parlements nationaux.
Concernant l’intervenant qui s’est insurgé contre le passage des tests pour les postes techniques, alors que les Etats membres avaient placé la confiance en leurs ressortissants, il lui a été démontré que c’est plutôt la meilleure pratique. A côté de la transparence apparaît aussi la compétence. Il en va d’ailleurs de la fierté des Etats membres d’être représentés par des hommes et des femmes à la hauteur de leurs fonctions.
Même si le Burundi est le seul pays parmi les onze à ne pas encore ratifié le Traité sous analyse, il a déjà bénéficié de l’apport de la CEEAC, notamment en réhabilitant les rives de la rivière NTAHANGWA et en envoyant en mission de maintien de la paix et de la sécurité un bataillon composé de 800 soldats Burundais en Centrafrique.